Toute la lumière sur la plus belle des fanfares hollywoodienne.
Composée en 1933 par Alfred Newman, la célèbre fanfare de la 20th Century Fox est peut être l’air le plus populaire
parmi tous ceux écrits pour représenter les plus grands studios du cinéma hollywoodien, ou en tout cas le plus aisément reconnaissable. Typique de l’âge d’or hollywoodien, la fanfare de la Fox est aussi la signature musicale la plus indissociable du cinéma américain, écrit pour un ensemble incluant une fanfare de cuivres (et notamment un groupe impressionnant de 4 trompettes) et un groupe de cordes et de percussions (caisse claire, timbales, cymbales, etc.).
La fanfare fut composée dès 1933 pour la création du jeune studio de la 20 th Century Pictures.
L’œuvre qui se limitait à l’époque à un simple appel traditionnel de trompettes solennelles sur un accord de Sib majeur se vit adjoindre une seconde section écrite en 1953 dans laquelle intervient un jeu de question/réponse entre les cordes et les cuivres sur une cadence parfaite typique – II ème degré – V e degré avec neuvième et onzième altérée - et enfin I e degré en Sib majeur.
Cette seconde section fut rajoutée pour célébrer l’arrivée de la technologie du Cinemascope, indissociable des grandes productions cinématographiques des années 50/60.
Plusieurs choses sont à noter dans cette fanfare : tout d’abord, l’aspect purement américain. Les roulements de percussions militaires en introduction, puis l’appel des 4 trompettes en triolets autour d’un même accord de Sib majeur répété plusieurs fois avec quelques appoggiatures (l’aspect le plus reconnaissable de cette fanfare), notamment dans l’alternance entre fa – sol b – fa (alors que sol b n’existe pas dans la tonalité de Si bémol majeur). Ensuite, la seconde partie qui débute avec un arpège ascendant de Sib aux violons, auquel répondent les cuivres sur un rythme similaire à la fanfare introductive, avec un accord de Do mineur (le IIe degré de Sib majeur). Puis, les cordes enchaînent avec un second arpège de Do mineur (do – mi b – sol – si b) débouchant sur une réponse des cuivres sur le Ve degré, avec quelques dissonances intéressantes créées grâce à un retard du IIe degré : le sol du Do mineur qui devient la mesure suivante sol b pour déboucher en glissement chromatique descendant sur le fa de l’accord de Fa majeur avec septième (mi b) et neuvième altérée avec le sol b, sans oublier la onzième avec la tenue de si b aux violons.
L’arrivée du sol b, là aussi étranger à la tonalité de Sib majeur, apporte une couleur musicale particulière et typique de cette époque : on retrouve ici la complexité harmonique héritée du Post-Romantisme allemand du XIXe siècle auquel Alfred Newman et bon nombre de ses confrères musiciens du Golden Age hollywoodien se revendiquaient complètement.
Alfred Newman et Kenneth Darby en séance d'enregistrement © Photo - All Rights reserved
Enfin, la fanfare se termine sur un ultime triolet conclusif débouchant sur un accord parfait de Si b majeur sur un puissant et solennel tutti orchestral, ponctué par un ultime coup de cymbales. Aujourd’hui, la fanfare de la 20th Century Fox symbolise à elle seule toute la culture musicale américaine et cinématographique, traversant les décennies et remise au goût du jour avec le « Star Wars » de George Lucas à la fin des années 70 et le retour des grands blockbusters à l’ancienne au début des années 80.
A noter qu’Elliot Goldenthal modifia le final de la fanfare pour les besoins du film « Alien 3 » de David Fincher en 1992, le morceau se concluant sur une cadence atonale et dissonante originale annonçant l’univers contemporain et avant-gardiste de la musique de Goldenthal (ce réenregistrement de la fanfare sera proposé sur certains albums et notamment dans la première piste de « Predator » d’Alan Silvestri chez Varèse Sarabande).
Analyse musical de Quentin Billard