Tout commence à New Haven...

 ​

Le jeune Newman est un garçon dont les centres d’intérêts sont simples A cette époque, la ville de New Haven est peuplée de 108 000 habitants, c’est le siège de l’Université de Yale qui a la réputation de produire les meilleurs étudiants en politique d’Amérique.

Mais c’est avant tout une ville qui concentre son activité autour de la culture et de l’art.

La maison des Newman est située sur Washington Avenue, dans le secteur défavorisé de la ville, ils vivent dans un quartier principalement peuplé d immigrants d’Europe de l’est.

Les parents d’Alfred sont immigrés russes de racine juive et sont arrivés aux USA durant leur enfance. Ils font partie de la communauté juive de New Haven qui est en constante croissance.

Son père, Michael Nemorofsky (Newman) , est négociant en produits. La guilde directoire de New Haven des années 1900 assimile ce métier à la vente de fruits et légumes. Il est resté dans le secteur de l'épicerie toute sa vie mais cette activité ne lui a jamais rapporté beaucoup d’argent.

En effet, durant ces années de vache maigre, il est en proie à des problèmes de pauvreté qui provoquent de sérieux dérèglements dans son couple et sur l’éducation de ses enfants dont il ne pourra jamais financer les études.

Sa mère, Luba Newman, née Koskoff, est arrivée aux Etats-Unis très jeune. Sa famille est arrivée de Kirovgrad (anciennement Elisavetgrad), une petite ville d’Ukraine située à 150 miles d’Odessa.

A dix-huit ans, elle épouse Michael Newman qui en a vingt-cinq. Le contexte de leur rencontre reste toujours flou mais il est bien possible que Luba ait rencontré Michael dans le milieu du négoce de fruits et légumes vu que son frère Isidore y travaillait également.

Michael n’est pas particulièrement touché par la musique, mais c’est plutôt Luba, qui fille de chanteur, voue une passion indéniable pour cet art qui va par la suite déteindre sur la personnalité du petit Alfred.

Luba chante et voue une forte passion pour les airs populaires traditionnels Russes et l’Opéra. C’est d’oreille qu’elle a appris à jouer de la mandoline.

Il est ainsi logique de constater que la tradition musicale populaire chez le jeune Alfred lui est parvenue de sa mère.

​

Luba a une sœur, Bella, chanteuse soprano amateur qui se produit dans la région de New Haven. C’est à l’occasion de certaines représentations en 1913 qu’elle emmène Alfred.

C’est donc naturellement que le jeune garçon qui n’a que trois ans, commence à dégager une attirance pour la musique. Rares étant les familles juives dans lesquelles la musique n’est pas de tradition. Déçue de ne pas avoir fait carrière dans la musique, Luba aspire un jour à ce que son fils devienne un grand virtuose. C’est ce qui la pousse d’ailleurs à lui donner ses premières leçons de mandoline. Newman commence aussi son apprentissage au piano très tôt mais il est impossible de dire précisément à quel âge il a débuté cet instrument.

Ne baissant pas les bras, Luba fera tout ce qui est en son pouvoir pour que tous ses enfants étudient la musique. Très vite, la maison Newman vibre alors au son du piano, du violon, de la clarinette, du saxophone et de la mandoline...

Cependant il était certain que l’enseignement de Luba allait être très limité et qu’il fallait au plus vite qu’Alfred prenne de vraies leçons de musique chez un professeur expérimenté.

La détermination de Luba fut extraordianire, elle était prête à tout, même à racler les fonds de tiroirs afin que son jeune fils profite d’une bonne formation musicale mais la situation financière était précaire, le peu d’argent qui rentrait dans la famille suffisait à peine à payer le charbon et la nourriture.

Une solution s’offrait à elle cependant car un ami peintre, également immigré russe, lui proposa pour une médiocre somme de donner des leçons de solfège à Alfred une fois par semaine. Mais la question n’était pas tout à fait résolue pour autant car il fallait trouver un instrument fiable qui allait permettre au jeune homme de 6 ans de progresser rapidement car là aussi, impossible d’acheter ni de louer quelque qu’instrument que se soit.

Luba, déterminée, persuada alors une autre amie qui possédait un vieux piano délabré de laisser son jeune fils l’utiliser. Mais sa maison n’était pas toute proche de celle des Newman, il fallut donc au jeune Alfred parcourir plus de dix miles par jour après l’école, pour pratiquer une heure et demie cet instrument en très mauvais état.

Une chose était certaine, Luba Newman privilégia les formations musicales de chacun de ses enfants avant toute chose. Bien plus tard, elle loua un piano à domicile pour Alfred et Robert, son frère, pour la somme de quatre dollars par semaine. Un instrument qu’elle ne réussit jamais à acheter dû aux soucis financiers constants de la famille.

A huit ans, Alfred entre dans une école de musique de New Haven avec comme professeur de piano, Monsieur Guido Hocke Caselotti. C’est lors d’un programme musical organisé par les élèves du conservatoire de musique italienne que le jeune Alfred donne les premières mesures de son talent. Sous la direction de son professeur il interprète «La Lettre à Elise» de Beethoven, son morceau préféré de l’époque. Ce fut officiellement son premier récital.

​

Vers une autre jeunesse dorée...

​

Très vite, le répertoire musical du jeune homme s'enrichit d'œuvres diverses et complexes. L'enseignement de qualité que lui donne son professeur Caselotti, lui est parfaitement profitable. 

En 1911, lors d'un autre récital donné à New Haven, le jeune musicien interprète avec virtuosité la sonate "Pathétique" de Beethoven, le Concerto en Do Mineur de Mozart, pour deux pianos, avec son professeur et diverses pièces d'Opéras chantées. 

A 12 ans, il fini sa formation auprès de Guido Caselotti qui aura durée trois ans à peu près.

Sa précoce notoriété, il la doit non seulement à son talent de virtuose mais aussi à sa curieuse taille qui ne le favorise pas au maniement de l'instrument mais qui plaisait beaucoup à son entourage. Alfred était un enfant de petite taille et il le restera toujours mais lorsqu'il jouait du piano, d'après les dires d'une de ses cousines, son attitude était impressionnante ! 

​

Au début de l'année 1913, la réussite et l'attitude courtoise du jeune homme attire l'attention de certains mécènes dont un certain Edward A. Parsons, eminent professeur de piano et compositeur occasionnel de New Haven qui lui offre immédiatement une bourse d'étude afin de palier à ses difficultés financières et de lui permettre d'accéder à un enseignement supérieur de musique à New York. 

Chez les Parsons, Alfred poursuit également sa formation de pianiste.

​

Le 9 septembre 1914, le récital solo qu'il donne à New London, consacré à Beethoven et Liszt dans le Connecticut lui vaut de rencontrer la célèbre poétesse et philanthrope, Ella Wheeler Wilcox qui se prend aussitôt de passion pour lui. 

​

Suite à venir

​